À dos de dragon

Cette histoire est inspirée d'un rêve que j'ai eu quand j'étais enfant. Bon voyage!

Le tonnerre me réveilla en sursaut. Tout était sombre autour de moi, et je ne voyais rien. Le grand lit de ma mère était froid et vide. J'étais seule. À travers les rideaux, la lumière illuminait le ciel brièvement avant de plonger la nuit dans le noir total. J'avais envie de pleurer et cherchais le confort de la chaleur maternelle, mais je n'avais que les lourdes couvertures pour m'envelopper, comme un cocon. Il y avait quelque chose de rassurant dans l'étreinte quasi-suffocante; je me sentais protégée des dangers extérieurs. Le bruit de la pluie qui tombait me rassurait et, comme une berceuse, me ramenait doucement vers le sommeil.

Je fixais le luminaire au-dessus de ma tête, mes pensées dérivant vers le monde des rêves, et je sentais mes paupières s'alourdir. C'est alors que je sentais Morphée m'emporter que je remarquais un mouvement au plafond. Une spirale nuageuse se formait, aussi sombre que les nuages dehors qui crachaient des éclairs. Je savais que je devrais avoir peur, mais je me sentais attirée par son centre.

Plus je regardais le tourbillon tourner, plus il semblait prendre la forme d'un dragon. Je distinguais parfaitement son corps serpentin, ses quatre petites pattes griffues, son long museau et sa longue moustache. Il ne semblait pas menaçant ; au contraire, il semblait m'inviter à le rejoindre. Alors, je me suis levée, me sentant si légère. J'ai regardé derrière moi et j'ai remarqué que mon corps, tout petit, était encore recroquevillé dans le lit de mes parents, bien au chaud. Cela me sembla naturel, et je n'étais pas le moins du monde inquiète.

Me tournant vers le dragon, je tendis la main, curieuse de sentir son corps nuageux sous mes doigts. Il me laissa le toucher, et je me suis sentie tirée vers l'avant, comme si le tourbillon m'aspirait. Tout autour de moi se brouilla, et j'ai fermé les yeux pour éviter d'être étourdie. Lorsque j'ai rouvert les yeux, j'étais à dos de dragon, traversant un ciel de nuages cotonneux. Tout était blanc autour de moi, et le sol n'était pas à portée de vue. Le vent dans les cheveux, je ne m'étais jamais sentie aussi libre.

Mon nouvel ami dragon me portait dans le ciel, volant sans hâte. Je ne savais pas où il me menait, mais je lui faisais entièrement confiance. Je regardais paisiblement les filaments blancs défiler autour de nous jusqu'à ce qu'une silhouette se dessine devant nous. Il s'agissait d'un immense palais avec un toit courbé et des colonnes de bois tout autour, décoré de rouge et d'or.

Alors que nous nous approchions, je pouvais voir la cour intérieure et son jardin aménagé. L'endroit me semblait familier, mais je n'arrivais pas à dire exactement où, ni comment. Le souvenir m'échappait dès que je tentais de m'y accrocher, comme de l'eau qui coule entre les doigts.

Au sommet des marches en pierre menant vers l'entrée du palais, un vieil homme habillé de soie jaune semblait nous attendre. Le dragon se posa à ses pieds, et je glissai de son dos. Il s'envola à nouveau, restant toutefois dans les parages, comme un ange gardien. Le vieil homme me sourit à travers sa longue barbe pointue et me tendit la main. Je saisis sa main ridée avec une confiance étrangement naturelle. Sa paume était chaude, et son allure bienveillante me rassurait. Il m'invita à le suivre à l'intérieur du palais, et nous franchîmes les portes majestueuses ornées de motifs complexes.

À l'intérieur, le palais était aussi impressionnant que sa façade extérieure. Des tapis luxuriants recouvraient le sol, et les murs étaient ornés de peintures décrivant des paysages célestes et des dragons dansants. Le vieil homme me guida à travers les couloirs, chaque pas résonnant dans le silence paisible du palais. Nous atteignîmes une grande porte en bois richement sculptée, et mon nouveau guide l'ouvrit pour révéler le magnifique jardin intérieur. Des fleurs aux couleurs éclatantes s'épanouissaient, créant un tableau vivant de beauté. Le doux parfum floral embaumait l'air, et des lanternes suspendues éclairaient délicatement les lieux.

Le vieil homme m'invita à m'asseoir avec lui sur un banc de pierre, et nous contemplâmes ensemble la splendeur du jardin. C'était un endroit magique, semblable à un rêve éveillé.

"Tu es spéciale, jeune fille," dit le vieil homme d'une voix apaisante. "Ton voyage avec le dragon t'a conduit ici, à un endroit entre les mondes. C'est un lieu où le temps n'a pas tout à fait la même emprise, et où les souvenirs peuvent être fugaces."

Intriguée, je lui demandai comment je pouvais me retrouver ici. Il me raconta une histoire ancienne, celle d'une passerelle entre les rêves et la réalité, et comment le dragon était le gardien de cet espace magique.

"Tu es venue ici pour une raison," dit-il en fixant le ciel. "Les dragons ont un don pour guider ceux qui en ont besoin. Écoute ton cœur et cherche la sagesse qui réside en toi."

Pendant un moment, nous restâmes silencieux, absorbés par la quiétude du jardin enchanté. Les heures semblaient s'écouler différemment dans cet endroit magique, et bientôt, le vieil homme se leva. Il me conduisit vers le bord du jardin, où le dragon majestueux nous attendait.

"Le temps est venu pour toi de retourner chez toi," dit le vieil homme. "Mais n'oublie jamais ce que tu as appris ici. Le jardin sera toujours là dans ton cœur, prêt à t'accueillir quand tu en auras besoin."

Le dragon s'inclina légèrement, comme s'il comprenait, et je montai à nouveau sur son dos. Le vieil homme agita la main avec un sourire bienveillant, et le dragon s'éleva dans le ciel blanc.

Le tourbillon nuageux réapparut, cette fois au-dessus du palais, et je me laissai emporter, observant le jardin disparaître sous mes yeux. Alors que nous traversions la spirale, je sentis Morphée m'enserrer à nouveau de ses bras, et le sommeil m'engloutit doucement. Au matin, je me réveillai qu’avec le souvenir fugace d’un dragon, d’un vieil homme et d’un palais avec un jardin magnifique.